Fédération européenne des journalistes

COVID-19 : il est temps de garantir une sécurité sociale pour tous


En pleine crise pandémique du Coronavirus (Covid-19), les gouvernements européens, institutions de l’UE et les partenaires sociaux prennent des mesures d’urgence pour protéger la santé et la vie des travailleurs et éviter un ralentissement économique sans précédent. Les affiliés de la FEJ travaille d’arrache-pieds pour protéger leurs membres, et notamment les freelances.

Le 20 mars, le groupe d’experts sur les freelances (FREG) de la Fédération européenne des journalistes (FEJ) a tenu sa première réunion en ligne. Elle a porté sur les mesures de compensation financière pour les freelances, pour beaucoup confrontés à des difficultés en raison du manque de commandes. Si certains pays ont garanti un soutien financier immédiat aux travailleurs et aux indépendants, d’autres offrent des prêts à faible taux d’intérêt et des exonérations fiscales au lieu d’un paiement net.

“La crise du COVID-19 montre l’absence de régimes de sécurité sociale fiables pour les freelances et les travailleurs atypiques en Europe”, a convenu le groupe. “Nous apprécions les mesures ad hoc, mais il est plus évident que jamais que nous avons besoin d’une stratégie durable à long terme pour protéger les freelances et les travailleurs atypiques dans le secteur des médias et de la culture”, a déclaré Oddrun Midtbø, co-président du FREG, originaire de Norvège.

“Dans certains pays, les freelances ne reçoivent aucune indemnité de maladie ou de compensation, bien que les journalistes soient reconnus dans de nombreux pays comme des travailleurs clés en cas de confinement. Et les prêts ne suffisent pas, car personne ne peut garantir qu’après la crise, ils pourront rembourser” a ajouté Pablo Aiquel, co-président français. “En fait, c’est le moment pour les gouvernements de mettre le concept d’un revenu de base universel à l’ordre du jour.”

Le groupe a partagé certaines des meilleures résolutions des pays européens (voir ci-dessous), qui devraient inciter les autres affiliés à faire pression sur les gouvernements qui n’ont pas encore apporté un soutien suffisant aux journalistes indépendants et freelance et aux autres travailleurs du secteur des médias.

“Nous félicitons nos affiliés d’avoir pris de si bonnes mesures d’incitation et de solutions créatives pour aider leurs membres, y compris le soutien aux travailleurs les plus précaires du journalisme, les freelances “, a déclaré la directrice de la FEJ, Renate Schroeder, et soutient du FREG depuis le bureau de Bruxelles. “La FEJ suivra dans les semaines à venir ce qui se passe au niveau national et coopérera avec la Confédération européenne des syndicats (CES) et les fédérations des arts et du divertissement sur cette question.”

Belgique (Flandre) : Les travailleurs indépendants peuvent compter à la fois sur les mesures existantes et nouvelles en fonction de leur situation. Lorsque la personne est malade, elle se voit accorder un montant journalier dès le premier jour de maladie, pour une période de 7 jours (mesure de 2019). Lorsque le travailleur n’est pas malade mais n’a plus de revenus, ce qui est le cas des journalistes sportifs et culturels par exemple, il ou elle a droit à une allocation mensuelle dès le premier jour d’inactivité. La mensualité s’élève à 1.614,10€ lorsque vous avez une famille et à 1.291,69€ lorsque vous n’en avez pas. Pour l’obtenir, il suffit de s’adresser à la caisse de sécurité sociale. Les autres mesures prises par le gouvernement sont l’exonération ou le report du paiement des cotisations de sécurité sociale pendant un an pour les deux premiers trimestres de 2020. En outre, les travailleurs indépendants peuvent bénéficier d’une réduction de leurs cotisations provisoires de sécurité sociale pour l’année 2020.

France : Le gouvernement a annoncé le versement de 70 % du revenu brut. Les dits “pigistes” devraient être inclus dans ce système de compensation car ils ont les mêmes droits que les journalistes salariés. Une bonne pratique peut être observée à Radio France, où des mesures exceptionnelles sont prises pour soutenir les collaborateurs freelance réguliers : Le montant brut versé sera au moins égal à la moyenne du montant brut total versé au cours des six derniers mois, c’est-à-dire de septembre 2019 à février 2020 inclus. Les contrats “piges” actuels sont tous maintenus, il n’y aura pas de résiliation. Pour les pigistes en contrat à durée déterminée ou CDD d’usage qui ne bénéficient pas pendant cette période de crise et en raison du contexte, d’un contrat avec Radio France ou un autre employeur, se verront appliquer le même système.

Finlande : Le gouvernement a approuvé un pack “Aide Corona” de 15 milliards d’euros comprenant des mesures telles que des garanties de prêts pour les entreprises et un soutien au marché du travail. Les freelances et les entrepreneurs pourront bénéficier d’une indemnité de chômage, d’un montant maximum de 724€ par mois. Les fondations privées culturelles ou pour le journalisme offrent des subventions avec un processus de décision accéléré.

Les Pays-Bas : Le gouvernement néerlandais soutient tous les freelances qui demandent une aide avec un montant égal au salaire social minimum. L’aide sera accordée pendant trois mois sans vérification d’autres ressources telles que les capitaux privés ou les revenus des conjoints. Selon le ministre des finances, il n’y aura pas de limite dans le temps pour en bénéficier.

La Norvège : Les entrepreneurs individuels et les freelances, dont beaucoup ont vu leurs revenus disparaître du jour au lendemain, pourront désormais également bénéficier d’une indemnité de maladie financée par l’État après le quatrième jour, au lieu du seizième jour, et ils pourront demander l’équivalent d’allocations de chômage s’élevant à 80 % de leur salaire moyen des trois dernières années, jusqu’à 600 000 NOK. (50 000€). La Fondation Fritt Ord soutiendra les journalistes et autres personnes avec 3,2 millions d’euros – pour des projets qui “peuvent garantir des espaces d’expression, développer de nouveaux canaux d’expression et aider un public dynamique et vital”.

Au Portugal, les travailleurs indépendants qui doivent rester à la maison avec leurs enfants en raison de la fermeture des écoles, recevront un tiers de leur revenu moyen, en tenant compte du dernier trimestre de 2019. Au Portugal, 30 % des journalistes sont indépendants et/ou précaires.

Suède : Le gouvernement central prendra en charge la totalité des indemnités de maladie pour les mois d’avril et mai. Les travailleurs indépendants seront également indemnisés, car ils sont éligibles pour recevoir une indemnité de maladie standardisée pour les jours 1 à 14. Afin de réduire le risque de propagation du virus dans la société, le jour de référence pour l’indemnité de maladie sera supprimé entre le 11 mars et le 31 mai et l’administration centrale versera une indemnité de maladie dès le premier jour de maladie. Une aide spéciale pour la culture et le sport d’un milliard de couronnes suédoises sera versée (environ 100 millions d’euros), mais il n’est pas encore clair si les indépendants recevront une rémunération de la caisse d’allocations de chômage s’ils continuent de travailler à temps partiel. Les détails, y compris les réformes du fonds d’allocation de chômage, sont actuellement discutés par le ministre du travail. Le syndicat suédois des journalistes (SJF) insistera sur cette demande auprès du ministre. Une enquête réalisée par le SJF au début de la semaine auprès de ses 1670 membres indépendants montre que la moitié des freelances déclarent avoir déjà manqué des missions.

En Belgique francophone, l’AJP travaille à la création d’un fonds de solidarité pour les journalistes freelance, qui ont été durement touchés par la crise : beaucoup d’entre-eux ont perdu tout ou une partie de leurs collaborations. Pour en savoir plus : www.journalistefreelance.be

En Allemagne, les syndicats ne sont pas satisfaits de l’aide promise par le gouvernement. L’Association des journalistes allemands (DJV) a qualifié d’insuffisant ce que, selon les médias, le gouvernement fédéral allemand a proposé comme aide aux journalistes indépendants, à savoir un montant de 9.000 à 15.000€ pour une durée de trois mois. Le DJV a plus encore critiqué l’instrument des prêts concessionnels, également en discussion.

En Grande-Bretagne, le syndicat national des journalistes (NUJ) a appelé le gouvernement à “intensifier” les efforts en faveur des freelances afin de s’assurer qu’ils ne soient pas un groupe “oublié” pendant la pandémie de coronavirus. Au Royaume-Uni, il n’y a pas encore eu de mesures pour protéger les cinq millions de travailleurs indépendants du pays.