Fédération européenne des journalistes

France : le journaliste Thomas Dietrich interrogé pendant deux heures par la police

Crédit: logo Le Média

Le journaliste du Média Thomas Dietrich a été convoqué par la police le 9 septembre au commissariat de Puteaux (Paris). Il y a été interrogé pendant deux heures dans le cadre de son enquête intitulée L’ancien chef des services secrets tchadiens échappe à la justice française. La Fédération européenne des journalistes (FEJ) et la Fédération internationale des journalistes (FIJ) se sont jointes à leur affilié français, le SNJ-CGT, pour dénoncer cette tentative d’intimidation et demander aux autorités compétentes de classer la plainte, jugée infondée, contre le journaliste.

La convocation faisait suite à une plainte déposée par l’ancien chef de la police tchadienne, Mahamat Ismaël Chaïbo, pour “menaces de commettre un crime ou un délit » après la visite du journaliste à son appartement parisien. Le journaliste nie avoir proféré des menaces lors de son entretien avec Chaïbo, qui s’est déroulé la semaine dernière sur le pas de la porte de l’appartement, et a été filmé. Au cours de l’entretien, Chaïbo a répondu brièvement à quelques questions avant d’appeler son avocat, disant que le journaliste posait des “questions bêtes” et lui demandant de « préparer une plainte.”

Thomas Dietrich a été relâché après trois heures en garde à vue, au cours de laquelle il a été interrogé pendant deux heures consécutives sur les allégations de menaces de Chaïbo. Aucune charge n’a été retenue mais la plainte n’a pas été classée. Thomas Dietrich dit s’inquiéter de la sévérité avec laquelle la police française l’a convoqué. Il interprète sa convocation comme une pression destinée à entraver son travail d’enquête et à chercher ses sources. 

L’entretien avec Chaïbo avait pour objectif de lui poser des questions concernant sa convocation par un juge français. L’enquête, co-écrite par Thomas Dietrich avec deux autres journalistes(L’ancien chef des services secrets tchadiens échappe à la justice française) et publiée le 3 septembre, révèle que Chaïbo, suspecté dans l’affaire de la disparition de son opposant politique, n’a pas encore été entendu en France. Interpellé à l’aéroport à Paris fin juin alors qu’il repartait au Tchad, il avait fait valoir son immunité diplomatique.  

Thomas Dietrich est un journaliste expérimenté qui enquête depuis plusieurs années sur la Françafrique et les crimes commis par les régimes autoritaires proches des gouvernements français.

“Nous ne pouvons que nous étonner de la rapidité des manœuvres d’intimidation de la police française envers notre journaliste, alors même que les autorités ont laissé par deux fois Monsieur Chaïbo repartir au Tchad, malgré ses convocations et la publication de notre enquête,” a écrit Le Média dans un communiqué de presse

Le SNJ-CGT a dénoncé une atteinte à la liberté d’informer : “Cette volonté manifeste de faire pression sur un journaliste bien connu des services tchadiens et du pouvoir en place n’est pas tolérable. Le SNJ-CGT met tout en oeuvre pour assurer la sécurité d’un journaliste dans le viseur du régime tchadien et de certains réseaux de la Françafrique, pour qu’il puisse poursuivre ses enquêtes,” a affirmé le secrétaire adjoint à l’international Pablo Aiquel

Le Secrétaire général de la FEJ, Ricardo Gutiérrez, a ajouté : “Cette affaire est grave car il s’agit d’une tentative d’intimider un journaliste et d’interférer dans son travail d’enquête. Thomas Dietrich ne faisait rien de plus que son travail de journaliste, en posant des questions et confrontant les faits. La plainte doit être classée  immédiatement. »

Le secrétaire général de la FIJ, Anthony Bellanger, a déclaré : « Nous ne pouvons accepter que les autorités harcèlent et exercent une pression judiciaire sur un journaliste pour l’empêcher de faire son travail. Nous sommes solidaires de Thomas et demandons instamment que cette plainte sans fondement soit classée. »